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Après leur rencontre avec l'art japonais, ils ne concevront plus jamais un tableau de la même manière. Degas et les autres en tirent la leçon de l'asymétrie, le goût du vide laissé au centre, des cadrages en plongée ou en contre-plongée, des formats en hauteur, en longueur et même en éventail, des contrastes jouant sur la profondeur, sans perspective. C'est le début du « japonisme pictural », qui va infuser en douceur toute l'avant-garde artistique occidentale en cette fin de XIXe siècle et participer à la révolution esthétique en route. Point d'orgue en 1890, quand Bing organise une grande exposition d'estampes à l'Ecole des beaux-arts. Elle connaît un succès phénoménal. Le japonisme s'étend et se banalise, on « japonise » à tout-va dans tous les domaines, jusqu'à la « japoniaiserie ». Cette vulgarisation des codes extrême-orientaux est bien la preuve éclatante que la greffe a pris. Au-delà de tout. Paul Signac, Femme se coiffant. Opus 227 (arabesques pour une salle de toilette), 1892, encaustique sur toile marouflée, 59 x 70 cm.
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L'ouverture du Japon En 1853, une escadre américaine fait irruption dans la baie de Tokyo et contraint le Japon à ouvrir ses ports, fermés aux étrangers depuis plus de deux siècles. Les nouveaux échanges commerciaux et diplomatiques permettent à l'art japonais de pénétrer en Occident, où il était pratiquement inconnu. En France, il suscite d'abord l'enthousiasme de petits groupes de collectionneurs et d'artistes, avant que les expositions universelles ne donnent à un public beaucoup plus large l'occasion de sa découverte. Dès 1862, une boutique spécialisée, La Porte chinoise, ouvre à Paris, rue de Rivoli. Les artistes y trouvent des articles décoratifs qu'ils incluent dans leurs œuvres pour y apporter une touche d'exotisme. Dans les ateliers, les modèles posent en kimono, un éventail à la main, entourées de porcelaines et de paravents japonais. L'Exposition universelle de 1878 consacre l'engouement populaire pour les objets venus du Japon. En 1890, une grande exposition d'estampes japonaises, présentée à l'Ecole des Beaux-arts, fait sensation.
Edmond de Goncourt note ce japonisme ambiant dans son Journal: « ce grand mouvement japonais, qui s'étend aujourd'hui de la peinture à la mode ». Monet ne fut pas le seul impressionniste qui s'attela à représenter le Japon. Quoiqu'il en soit le thème de ce tableau fut motivé par l'attrait et la fascination de Monet pour le Japon. Bien qu'il ne voyagea jamais dans ce pays, il découvrit très tôt, dès l'âge de seize ans, des estampes japonaises, ramenées du Japon par des marins. Il collectionnera d'ailleurs des estampes de maîtres japonais tels que Katsushika Hokusai. Sa collection atteignit les 250 estampes. Plusieurs de ces tableaux furent inspirés des paysages japonais. Son jardin d'eau à Giverny fut d'ailleurs inspiré des mondes flottants de l'ukiyo-e. Il vivait ainsi en Normandie comme au Pays du Soleil-Levant. Cette peinture ne fut pas vendue toute de suite lors de l'exposition de 1876 peut-être en raison de ses ambiguïtés. Cela a peut être affecté Monet, qui d'ailleurs était en difficulté financière à l'époque.